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19 octobre 2011 3 19 /10 /octobre /2011 17:23

Dans la dernière livraison du Nouvel Observateur  (n° 2449.  11-18-10 / 2011) François Caviglioli  attire l'attention  des lecteurs sur le petit livre que Clémentine Autain a fait paraître aux éditions indigènes.

Je me suis rendu compte de la toxicité en psychiatrie du conceptde "complexe d'oedipe" quand j'ai fait part  en  staff que le grand-père qui venait d'être hospitalisé pour "dépression" était en fait plus inquiet que déprimé parce que sa petite fille, qui venait d'être hospitalisée, risquait de dévoiler qu'il entretenait des rélations interdites avec elle: tout de suite la Chef du Service déclara qu'il n'avait fait que rêver, qu'il  ne s'agissait que de "fantames". Il y a de cela trente cinq ans.

A cette époque, les révélations du psychanalyste Jeffrey-Moussaïeff MASSON "Le réel escamoté" (''Assault on truth" en anglais) n'avaient pas encore été publiées. Elles le seront en 1984, chez Aubier". Mais longtemps après la publication de cet ouvrage majeur, la doxa analytique a continué de sévir en psychiatrie  : cf. les déclarations du psychiatre-psychanalyste Samuel Lepastier du 8 février 2006 parues dans le journal "Le Monde" à propos des enfants d'Outreau. Ce psychiatre parait ignorer qu'en France deux millions de personnes ont été réelement victimes d'incestes, et combien d'autres d'attentats sexuels dans leur enfance.   

Ce qui m'étais  arrivé en 1945  dépasse l'imagination des psychiatres et des psychanalystes qui préfèrent faire semblant de croire qu'il ne s'agit que de fantasmes. C'est une façon commode d'escamoter le réel.  Tristane Banon n'a que grâce à un concours de circonstances pu se faire entendre sans être raillée, sauf par son agresseur, qui l'a accusé de n'être que victime de son "imaginaire".

Seuls les pervers ou leurs victimes savent qu'il ne s'agit pas de fantasmes, comme je l'ai expliqué à une  pédiatre rencontrée dans un lieu de parole, parce qu'elle aussi, mais à l'adolescence, avait été victime de l'irracontable.


Cette consoeur avait d'abord voulu parler "en analyse" de ce qui lui était arrivé. Elle s'était tout de suite entendu dire que ce n'était que des fantasmes, qu'elle ne pouvait prétendre avoir été abusée dans son enfance par son papa médecin alors qu'elle-même a pu devenir pédiatre. Le dogme qu'il ne s'agit que de fantasmes est renvoyé à la tête des victimes depuis que Freud a bataillé pour expliquer au monde que c'est le complexe d'Oedipe et son cortège de pulsions refoulées qui est la cause de ces plaintes. En France le discours de Freud a toujours cours : lire p. ex.  Samuel Lepastier  (psychiatre et "psychanalyste") dans "Le Monde" du 8 février 2006,  au sujet des enfants d'Outreau.   

Ce que je ne pouvais pas rapporter dans ma lettre à Badinter, et dont j'aimerais pouvoir parler, c'est de ce qui m'est arrivé juste après la fin de la guerre en 1945 au domicile du Dr. B. J'avais alors à peine à peine six ans.

Le Dr. B. valait son pesant : il ressemblait un peu à Guy Mollet.  Médecin du quartier où habitait mes parents, il poussait la conscience professionnelle jusqu'à aller revoir ses patients, même quand il n'avait pas été rappelé. Son cabinet était situé juste de l'autre côté de l'appartement de mes parents, côté cour, dans l'immeuble de la rue Bezout, un immeuble qui fait l'angle avec la rue du Commandeur, où mes parents habitaient un petit trois pièces- cuisine de 44 mètres carrés, très exactement au  troisième étage  du n° 24 de cette rue circulaire et mal pavée (repavée depuis). Un appartement que ma soeur habite toujours.

Ma mère m'a raconté un jour qu'elle avait été surprise de le voir venir sonner à la porte. Il lui avait dit que c'était pour surveiller l'évolution la bronchite que ma sœur - mon aînée de deux ans - avait présentée dans les semaines précédentes. Ma sœur allait très bien et ma mère n'avait pas jugé utile de demander au médecin de revenir. Elle avait d'abord  pensé qu'il avait voulu la revoir mu par le soucis de ne rien laisser au hasard. Mais quand il est revenu la semaine suivante pour la deuxième fois, la visite de contrôle se bornant à rester sur le pas de la porte à demander de ses nouvelles et à réclamer pour cette nouvelle visite improvisée de nouveau des  honoraires, comprenant qu'il ne revenait que pour se faire payer des visites, ma mère me raconta qu'elle lui avait fermé la porte au nez.

Mes parents auraient dû  se méfier un peu plus tôt. Non seulement en 1943 il m'avait fait hospitaliser aux enfants malades pour me faire opérer d'un appendicite que je n'avais pas (j'ai toujours mon appendice), mais en 1945, il avait été trouver  mes parents pour leur dire qu'il fallait qu'ils prennent garde à ce que je ne devienne pas rachitique, qu'il serait par conséquent dommage de ne pas profiter de ce qu'il avait dans son cabinet installé une rampe à U.V. pour lutter contre ce fléau.  A  l'époque, mes parents, ma mère autant que mon père, avaient la hantise du rachitisme. Ils n'avaient pas vu malice à sa proposition.

Je me rappelle très bien ma surprise lorsque je me suis retouvé chez lui. Ce n'était pas sur un petit lit dans une petite cabine qu'allaient se dérouler les séances, mais dans une grande chambre, dans laquelle était installé un très grand lit carré recouvert d'un drap blanc. Au dessus du lit, un grand luminaire rectangulaire ressemblant à ceux que l'on peut voir suspendus  au dessus des tables de lecture des grandes bibliothèques.

L'installation me parut tout de suite disproportionnée par rapport à moi comme par rapport l'appartement du médecin : on aurait pu  facilement installer quatre personnes sur ce lit.

On me déshabilla et on m'installa sur le lit. On plaça un petit traversain sous ma tête puis on couvrit mes yeux d'un feutre noir, tenu en place par une bande élastique passée derrière la tête.

La première séance était prévue pour durer une quinzaine  de minutes, les suivantes pour durer plus longtemps. Mes parents habitant à une minute de là, ma mère  pouvait rentrer chez elle en attendant de revenir me chercher. Tout se passa bien et je retournais d'autant plus volontiers les fois suivantes que c'était agréable de sentir la chaleur des lampes, et très reposant. J'étais seulement étonné de me retrouver à chaque fois tout seul alors qu'il y avait place pour quatre, si ce n'est plus.Pourquoi le Dr.B. n'avait-il  pas songé à rentabiliser son installation !?

Mais mes parents firent bientôt cesser les séances. La dernière s'était montrée catastrophique, suivie de terreurs nocturnes. Ma mère expliqua bien plus tard   - en 1986, quand me vint  l'idée  de l'interroger  au sujet de ces séances - que les rayons avaient été la cause de mes cauchemars. Je m'étais soudain mis à ne plus vouloir y retourner,  ni  à dormir seul dans la salle à manger, où je dormais d'habitude sans problème. J'avais exigé et obtenu de mes parents qu'il  déplacent mon lit pour l'installer la chambre où ils dormaient. Mais quand je leur ai interdit d'éteindre la lumière, mon père s'était  mis en colère et me  frappa comme un fou. Il était hors de lui et hurlait  : << Mais qu'est-ce qu'il a ce gosse à nous  .... >> . Ma mère me raconta qu'elle avait alors eu très peur qu'il ne me tue,  qu'elle avait été obligée de s'interposer pour l'arrêter.  Du petit garçon déluré que j'étais, qui faisait la fierté - très narcissique - de son papa,  j'étais d'un seul coup devenu une loque. A cause des rayons, croyèrent-ils, j'étais devenu  un petit poltron qui avait peur de tout, même de la boutique du coiffeur qui faisait le coin de la rue. Je ne voulais plus passer devant. La grande clarté de la boutique et les sèches cheveux me faisaient hurler. Il fallait que quelqu'un me tire par la main pour  passer.

J'avais  finalement accepté de retourner dormir dans la salle à manger. Mes parents avait aussi accepté de me laisser dormir avec une  lumière restée allumée. Je me rappelle que je restais alors longtemps éveillé  à surveiller je ne sais qui pourrait venir durant mon sommeil, un sommeil qui  ramenait souvent le même rêve terrifiant : quelqu'un m'ensère dans drap ou une couverture, et m'empêche compétement de bouger. Tandis que j'essaie de me dégager, j'éprouve une très vive douleur, si forte qu'elle me paralyse et m'empêche de crier. Malgré tous mes efforts, aucun cri ne sort de ma bouche. Puis je passe soudain du noir le plus total à la lumière la plus aveuglante, qui envahit tout l'espace, et me réveille. Et ce rêve cauchemardesque s'est répété souvent, pendant des dizaines d'années, jusqu'à ce que ma mère me dise réellement pourquoi elle s'était arrangée pour me faire partir en Suède quelques mois après cet "incident" dans une famille d'accueil.  On  mit mes terreurs nocturnes et la terreur que m'avait inspiré une aurore boréale (dont je n'ai gardé aucun souvenir, mais on m'a raconté la scène quand je suis revenu des années tard sur les lieux) sur le dos de la guerre et des bombardements, mais comme je m'étais à part ça tout de suite très bien adapté, parlant presque tout de suite suédois, je fus reçu de la meilleure façon qui soit. << Si je ne t'avais pas fait partir en Suède, ton père aurait fini par te tuer >> , m'a expliqué ma mère quand je lui ai demandé pourquoi j'avais été envoyé en Suède. Ma mère et la Suède m'auraient donc sauvé la vie.  

P. C. ,   le 19/ 10 /2011        


P.S.  En tant que psychiatre je croyais pouvoir  parler de ce que j'avais sur le coeur à une consoeur, qui  fut plus tard elle-même perscutée par l'Ordre des médecins dans sa lutte contre la pédophilocratie médicale. Mal m'en prit de lui avoir dit qu'il ne fallait surtout pas prévenir l'Ordre des médecins dans les histoires de médecins pervers. Elle ne crut pas à mes histoires, croyant que je cherhais à la dissuader de faire des signalements. Elle passa outre et se retrouva interdite d'exercise pour trois fois trois ans.      

La pychanalyse explique que contrairemet à ce que mes parents avaient cru,  les séances de rayons ultra violets n'étaient pour rien dans mes cauchemars.  Ma phobie des salons de coiffure venait  de mes pulsions jusque-là insconscientes (comme le disent certains psychanalystes de Auguste Strindberg, Mme Chasseguet-Smirgel, par exemple, qui ignore visiblement les limites de son "art").  Freud aurait expliqué que  pulsions avaient été exacerbées  par le fait que  mes parents avaient un soir accepté que  mon lit soit placé dans leur chambre à côté du leur. C.Q.F.D..

Freud et ses zélotes auraient expliqué que la  phobie des luminaires et des coiffeurs  renvoie au  complexe d'Oedipe, et Otto Rank aurait dit qu'elle renvoyait   "traumatisme de la naissance". 

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